Le pou et l'araignée


Arrangement : Xavier Hubaut 

1. Un pou s' baladait dans la rue,
Il rencontra chemin faisant,
chemin faisant,
Une araignée bon enfant
Qui s'en allait court vêtue;
Ell' vendait du verr' pilé,
Pour s'ach'ter des p'tits souliers.


L'illustration est extraite de
Chansons Cochonnes
Chansons estudiantines traditionnelles
adaptées en bandes dessinées par L-M
CARPENTIER - MALIK - JIDÉHEM - KOX
couleurs LAURENT album 48 pages
cartonné couleur format 22-29cm
Editions Topgame


Là tu, là tu m'emmerdes
Là tu,là tu m' fais chier
Tu nous emmerdes
Tu nous fais chier
Tu nous emmerdes
Tu nous fais chier
Et on entend dans les champs
Se masturber les éléphants,
Et on entend dans les prés,
Gazouiller les chimpanzés,
Et on entend sous les ormeaux
Battr' la merde à coup d' marteaux,
Et on entend dans les plumards
Battr' le foutre à coup d' braquemarts.
Non, non,non, non, Saint Eloi n'est pas mort (bis)
Car il bande encore (bis)


2. Le pou voulait la séduire
L'emm'na chez l' mastroquet du coin,
troquet du coin,
Lui fit boir' cinq, six coup's de vin,
L'araignée ne fit qu'en rire.
La pauvrett' ne s' doutait pas
Qu'ell' courait à son trépas.

3. Le pou lui offrit une prise
En lui disant d'un air joyeux,
d'un air joyeux,
Fous-toi ça dans les narines
Et mouch'-toi avec ta ch'mise.
L'araignée qu'en avait pas
Lui fit voir tous ses appas.

4. Le pou qui n'était qu'un' canaille
Lui offrit trois francs six sous,
trois francs six sous:
"Eh! Dis donc, c'est pas l' Pérou
Ca ne me dit rien qui vaille,
Si tu m' donn's quatr' sous de plus
J' te ferai voir le trou d' mon cul".

5. C'est ici qu' les horreurs commencent
Le pou grimpa sur l'araignée,
sur l'araignée
Et n' put s'en décoller
Tant il eut de jouissance,
Si bien qu' la pauvre araignée
Ecop' d' la maternité.

6. Le pèr' d' l'araignée en colère
Lui dit: "Tu m'as déshonoré,
déshonoré,
Tu t'es laissée enceinter,
T'es aussi putain qu' ta mère!"
L'araignée de désespoir
S'est foutu treiz' coups d' rasoir.

7. Le pou, le désespoir dans l'âme,
S'arracha des poignées d' cheveux,
poignées d' cheveux
Puis disant: "Y a plus d' Bon Dieu",
Il monta à Notre-Dame
Et c'est là qu'il s'est foutu
Les cinq doigts et l' pouc' dans l' cul.

8. Alors, les poux du voisinage
Se réunir'nt pour l'enterrer,
pour l'enterrer
Au cim'tièr' de Champerret
Tout comme un grand personnage
Et c'était bien triste à voir
Tous ces poux en habit noir!


La paternité de cette chanson n'a jamais été éclaircie de manière irréfutable. Deux auteurs sont fréquemment cités. Pour les paroles, Alfred de Musset et pour la musique, Hector Berlioz. Bien évidemment le refrain n'est pas d'origine.

Vrai ou faux ?

On ne doit pas oublier qu'Hector Berlioz a été étudiant en médecine et aimait les plaisanteries musicales telles Chasse à la grosse bête, Chœur de 402 voix en langue celtique inconnue, Salut matinal improvisé en langue et musique kanaques... pour n'en citer que quelques unes.

Quant à Musset, c'était un pilier de cabaret, un alcoolique notoire. On lui a prêté plusieurs "œuvres" parmi lesquelles Les filles de Loth...
A cette hypothèse, d'aucuns opposent le fait que Berlioz n'appréciait guère Musset: "C'était un sauvage peu gracieux ! Je le détestais." écrivait-il. Pourtant Berlioz a composé "Aubade" une pièce chantée sur des couplets de Musset !

Mentionnons quand même le texte le plus proche du style de Musset retenu par Pierre-René Serna. Remarquons toutefois la disparition du quatrième couplet :

1. Un jour un pou dans la rue
Rencontra chemin faisant
Une araignée bon enfant.
Elle était toute velue.
Elle vendait du verre pilé
Pour s'acheter des p'tits souliers.

2. Le pou, qui voulait la séduire,
L'emmena chez l'mastroquet du coin,
Lui fit boir' cinq six coups d' vin.
L'araignée n'en fit qu'en rire.
La pauvrette ne s' doutait pas
Qu'elle courait à son trépas.

3. Le pou lui offrit une prise
En lui disant d'un air joyeux:
"Coll'-toi ça dans l'trou des yeux
Et mouche-toi avec ta ch'mise !"
L'araignée qu'en avait pas
Lui fit voir tous ses appas.

4. Alors commencèrent les horreurs:
Le pou grimpa sur l'araignée.
Il n' pouvait plus s' retirer
Tant il éprouvait d' bonheur.
Et c'est comm' ça qu' l'araignée
Écop' la maternité.

5. Le pèr' d' l'araignée en colère
Lui dit : "Tu m'as déshonoré !
Tu t'es laissée enceintrer !
T' es encore plus putain qu' ta mère."
L'araignée de désespoir
S'est flanquée treiz' coups d' rasoir.

6. Le pou, le remords dans l'âme,
Se tir' la barbe, s'arrach' les ch'veux.
"Ah ! qu'il dit, Y-a plus d'Bon Dieu !"
Monte sur les tours d' Notre-Dame,
Et c'est d' là-haut, quelle pitié,
Que dans l' vide il s' est jeté.

7. Lors tous les poux du voisinage,
Se réunirent pour l'enterrer
Au cimetière de Champerret,
Tout comme un grand personnage.
Et c'était bien triste à voir,
Tous ces poux en habits noirs.

Nous en resterons là, avec un système de deux équations à deux inconnues non résolu.

D'après Le pou et l'araignée de Pierre-René Serna

En fait, il y a très peu de différences avec la version de l'Anthologie hospitalière et latinesque.

Là-bas, le pou offrait une prise en lui disant : "Colle-toi ça dans l' trou des yeux". Cette curieuse erreur a été rectifiée.
Quant à la fin, le cimetière de Champerret à remplacé celui de Levalois-Perret (avec une syllabe supplémentaire).


Dans un curieux petit ouvrage intitulé "Glosaire" publié en 1933, on trouve la version suivante:
Tu m'la tu m'la tu m'la tu m'la tu m'la tu m'la
Tum' la tu m'fais chier.


1. Un jour, un pou dans la rue
Rencontra, chemin faisant,
Une araignée bonne enfant.
Elle était toute velue,
Ell' vendait du verr' pilé
Pour s'ach'ter des p'tits souliers(1).

2. Le pou voulant la séduire
L'emmèn' chez l'mastroquet du coin,
Il lui offre un verr' de vin;
L'araignée se met à rire,
La pauvrett' ne s'doutait pas
Qu'ell' courait à son trépas.

3. Le pou lui offre une prise
Et lui dit d'un air joyeux :
Coll'-toi ça dans l'trou des yeux,
Essuy'toi avec ta ch'mise;
L'araignée qui n'en a pas
Lui fait voir tous ses appats.

4. Le pou en franche canaille
Lui offre trois francs six sous;
Trois francs six sous, c'est pas l'Pérou;
Ça n'est qu'un fétu de paille.
Si tu m'donn' six sous de plus,
J'te f'rai voir le trou d'mon cul.

5. Voilà les horreurs qui commencent
Les chaussett' sont dévissées
Trois fois l'pou dut s'regimber
Taut il avait de jouissance...
La pauvrett' fut bien forcée
D'gober la maternité.

6. Le pèr' d'l'araignée, en colère,
S'écrie : "Tu m'as déshonoré!
Tu t'es laissé enceinter
J'te fous mon pied au derrière!"
L'araignée, de désespoir,
S'a foutu trois coups d'rasoir(2).

7. Le pou, le désespoir dans l'âme,
S'arrach' des poignées de cheveux,
Il s'écrie : " Y a pus d'bon Dieu! "
Et monte aux tours Notre-Dame.
Et c'est là qu'i| s'a foutu
Les cinq doigts et l'pouc' dans l'cul.

8. Tous les poux du voisinage
Vinr'nt à son enterrement,
Vinr'nt à son enterrement,
Comm' pour un grand personnage
Et c'était pitié d' voir
Tous ces poux en habit noir.

(1) Variante: des p'tits pâtés
(2) Variante : trois, treize ou trente

L'auteur de cette brochure commence en apportant quelques éclaircissements à propos du refrain.

Pendant l'Exposition de 1900, on chantait une fameuse scie (totalement oubliée), celle des deux cousins Tumelin et Tumelech (ou plutôt exactement Tumelin et Tumelèche, enregistrée par Fernandel); il en cite quelques extraits:
- Tumelin fait une maison et Tumelech l'habite.
- Fabricants tous deux de cravates en série, Tumelin fait le tour du cou et Tumelech le nœud.
- Tous deux tailleurs, Tumelin fait un habit trop large et Tumelech l'échancre.
- Tous deux quincaillers, Tumelin vend les outils et Tumelech les poèles.
- Tumelin essaie une voiture: des craquements se produisent ! Tumelin avertit son associé: "Tumelech, les roues pètent !"

Ces fines plaisanteries expliqueraient les "Tu m'la" du refrain qui pourraient être complétés de diverses manières: Tu m'la fait raidir, Tu m'la fait dresser, Tu m'la fait bander...

Par contre, on trouve une indication plus sérieuse à propos du mastroquet du coin. Le mastroquet du "Coin" aurait été un lieu fort fréquenté non loin du Parc de Nevers.

Terminons par une remarque à propos du refrain (bien compliqué!).
Dans l'Anthologie hospitalière et latinesque (1911), le refrain se limite aux 6 premiers vers.

La suite formée des 8 vers suivants a manifestement été ajoutée. A notre connaissance elle n'apparaît que partiellement (les 4 derniers vers) en 1933 dans Chansons gaillardes et bacchiques et la même année sous la forme "Tu m'la" mentionnée plus haut. Ce n'est qu'au début des années 50 que les 8 vers apparaissent au complet.


Quant aux deux derniers vers bissés, ils sont encore d'un autre style. Ils sont apparus à la même époque mais leur existence est bien plus ancienne. En effet, dans la Flandre française et en Belgique, à l'occasion de la Saint-Louis (25 août), il y avait congé dans les fabriques de textile; les enfants chantaient:
Eh bé non, non, Saint Louis n'est pôs mort ! (bis)
Car i tchante acor (bis)
Tout du long d' sin méti
Y a des rat's et des souris

Les deux derniers vers, trop empreints de l'origine ouvrière de cette chansonnette, ont disparu. Saint Louis à fait place à Saint Eloi, patron des orfèvres et fêté par les ingénieurs. Evidemment, "Car il chante encore" reste la version réservée aux enfants.

Signalons que dans Les quat'z'arts (1964), Brassens, grand connaisseur de chansons paillardes, chante:

Et les bonshomm's chargés de la levée du corps
Ne chantaient pas non plus "Saint-Eloi bande encor !"