Le duc de Bordeaux


Version des Quatre Barbus

Harmonisation : Robert Ledent
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Refrain:

Taïaut Taïaut Taïaut!
Ferm' ta gueule, répondit l'écho.


1. Le duc de Bordeaux ressemble à son frère,
Son frère à son père et son père à mon cul;
De là je conclus qu' le duc de Bordeaux
Ressemble à mon cul comme deux gouttes d'eau.

2. Le duc de Chevreuse ayant déclaré
Que tous les cocus devraient être noyés,
Madam' de Chevreuse lui a demandé
S'il était certain de savoir bien nager.

3. Madam' la duchesse de la Trémouille,
Malgré sa pudeur et sa grande piété,
A patiné plus de paires de couilles
Que la Grande Armée n'a usé de souliers.

4. Le roy Dagobert a un' pine en fer,
Le bon Saint-Eloi lui dit: "Eh bien! mon roi,
Si vous m'enculez, vous m'écorcherez"
"C'est vrai, dit le roi, j'en f'rai faire un' de bois".

5. J'emmerde le roy et le comt' d'Artois,
Le duc de Berry et la duchesse aussi;
Le duc de Nemours, j' l'emmerde à son tour
Le duc d'Orléans, je l'emmerde en mêm' temps!

6. Chasseur as-tu vu le trou de mon cul?
Si tu veux le voir, tu reviendras ce soir;
Moi, j'ai vu le tien, je n'en ai rien dit,
Si tu vois le mien, tu n'en diras rien.

7. La p'tite Amélie m'avait bien promis
Trois poils de son cul pour en faire un tapis;
Les poils sont tombés, l' tapis est foutu,
La p'tite Amélie n'a plus d' poil à son cul.

8. La bite à papa qu'on croyait perdue,
C'était la p'tit' bonn' qui l'avait dans les fesses;
La bite à papa n'était pas perdue,
C'était la p'tit' bonn' qui l'avait dans le cul.




En fait, il s'agit d'une chanson très ancienne qui a grandi et s'est développée au fil des ans ! Les deux premiers couplets semblent originaux; les autres sont manifestement postérieurs.

En effet, on retrouve le premier couplet dans le tome 2 des Lettres historiques et galantes, de deux dames de condition publié en 1733. Il figure également dans le volume VIII du Chansonnier de Maurepas où il est daté de 1694. Toutefois, nous n'en avons pas retrouvé la trace originale.

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La Fille à Dangeau
Ressemble à Dangeau :
Dangeau ressemble à mon Cu.
De là je conclus,
Que la Fille à Mr. Dangeau
Ressemble à mon Cu,
Comme deux goutes d'eau.

Dangeau
Dangeau

Note: Dans les transcriptions, nous respecterons toujours l'orthographe de l'époque..


Cette chanson aurait été "celle que Madame la Duchesse [de Bourgogne] fit au sujet de la Duchesse de Montfort, fille de Philippe de Courcillon, Marquis de Dangeau".

Le Marquis de Dangeau eut, de son premier mariage, une fille Marie-Anne-Jeanne de Courcillon qui épousa en 1694 Honoré Charles d'Albert, Duc de Luynes, fils aîné du Duc de Chevreuse et connu sous le nom de duc de Montfort. De cette union naquit Charles Philippe d'Albert (1695-1758) qui devint par donation de son père, Duc de Chevreuse et par la suite Comte de Dunoy et de Monfort. Ceci explique peut-être l'intervention du Duc de Chevreuse dans le deuxième couplet.

Saluons au passage la haute valeur pédagogique de ce couplet qui nous apprend par l'exemple, le syllogisme et sa transitivité.
Cela n'a pas échappé au grammairien belge Marc Wilmet, auteur de la Grammaire critique du français, (De Boeck Université,2003). Il écrit à la page 519, dans le chapître 9 consacré à la phrase et plus précisément dans la section 3.2.1.2. Verbes transitifs et verbes intransitifs:

Wilmet

Mieux encore. On trouve l'idée du deuxième couplet dans une épigramme (traduite de John Owen) de 1626 dans l'Ouvrage poétique du Sieur de la Charnays:

Un sot contre un autre fâché
Lui ayant reproché
Qu'il était maître en cocuage,
Disait de furie det de rage:
Je voudrais que tous les cocus
Fussent au plus profond de l'onde,
Et m'en eût coûté cent écus.
Mais sa femme le mieux du monde
Lui dit: Vous seriez en danger,
Car vous ne savez pas nager;

Ce thème est repris par de nombreux auteurs; citons également une épigramme due à Andrieux-Poulet, datée de 1711(?) et publiée par Jean Neaulme, à La Haye:

L'autre jour, le voisin Pierre
Disait que pour cent escus
Il voudrait qu'à la riviere
L'on jetta tous les cocus

Mais sa femme étant présente
Craignant pour lui le danger,
Luy dit en femme prudente
"Mon amy, sais-tu nager ?"

L'air de cette chanson semble dériver d'une sonnerie de trompe de chasse intitulée La Dampierre, composée par Marc-Antoine, marquis de Dampierre (1676-1756), Premier Gentilhomme des Chasses et Plaisirs du Roi.

Sitôt cet air créé, la voix populaire s'empressa de "rendre hommage" à son créateur en y adaptant ces paroles :

Monsieur de Dampierre ayant demandé
Que tous les cocus soient noyés
Madame de Dampierre lui a demandé
S'il était sûr de bien savoir nager.

Le voisin Pierre est-il le marquis de Dampierre ?


Last but not least ! Le thème du troisième couplet se trouve déjà dans Le Parnasse satyrique du Sieur Théophile (de Viau) daté de 1622. Il s'agit d'une épitaphe. Bien entendu, vu la référence à la Grande Armée, le texte actuel est une adaptation post-napoléonienne.

Cy dessous gist la belle Nipheset(*)
Fille d'amour & mere des andoüilles,
Qui aime mieux le [fou]tre que le lait:
Et use moins de soulliers que de coüilles

(*) Il se pourrait que Nipheset fasse référence à Nefertiti,
la très belle épouse d'Akhenaton.

couillles et souliers

On retrouve au XVIIIe siècle dans Mirlondène:

C'est Madame de Mirlimouilles
Qui demeure aux andouillers.
Elle a plus usé de couilles
Que de paires de souliers.

Bref, la chanson s'est enrichie peu à peu au cours des siècles.


Dans le volume 2 de l'Anthologie hospitalière et latinesque, on trouve sous le titre "Air de Chasse" 3 couplets assez proches: pp.27, 321 et 347; ils correspondent à nos couplets 1, 6 et 4.

En France, on trouve également cette chanson sous un autre air et un autre titre Les Psaumes; les couplets sont fort semblables.


Cette chanson est devenue un véritable classique ! Georges Brassens y fait allusion dans la Vénus callipyge (1964):

>
C'est le duc de Bordeaux qui s'en va, tête basse
Car il ressemble au mien comme deux gouttes d'eau
S'il ressemblait au vôtre, on dirait, quand il passe
"C'est un joli garçon que le duc de Bordeaux !"




Les Quatre Barbus en ont donné une version fort drôle. Les paroles ont été modifiées (par Francis Blanche) - censure de l'époque oblige - et ils y ont mélangé un autre air (Ah ! Mesdames, voilà du bon fromage ).

Nous vous proposons d'en écouter le dernier couplet .

1. Le Duc de Bordeaux ressemble à son père,
Son pèr' qui était un illustre boxeur;
Il en a gardé certaines manières
Qui choquent beaucoup tous les autres seigneurs.

Il essuie ses pieds sur les tapisseries
De monsieur le Duc d'Angoulème
Au diner du roi quand on sert du riz,
Il trempe ses doigts dans la crème.

Le Duc de Bordeaux a pris l'habitude
De brûler ses femm's dans un vaste fourneau
De là je conclus que l' Duc de Bordeaux
Ressemble à Landru comme deux gouttes d'eau,
Oh, oh, oh,
Ah mesdames, voila un beau visage,
Ah messieurs, conservez-en l'image,
Voila un beau visage français
Digne du pays de Molière et d' Musset.

2. Le Duc de Bordeaux ne boit qu' du Bourgogne,
Mais l' Duc de Bourgogne, lui, ne boit que de l'eau;
Ils ont aussitôt échangé sans vergogne
Un verr' de Bourgogne contr' le port de Bordeaux.

Ce traité idiot nous démontre un truc:
C'est qu' le vin déforme l'histoire
Et que les eunuques qui éduqu'nt les Ducs
Devraient leur couper l'envie d' boire.

Le Duc de Bordeaux ressemble à son père,
Son père à son frère et son frère à Mon...taigne,
Si bien qu'on n' sait plus c' qui est le plus beau,
Le Duc de Montaigne ou les essais d' Bordeaux,
Oh, oh, oh,
Ah mesdames, voila un beau visage,
Ah messieurs, conservez-en l'image,
Voila un beau visage français
Digne du pays de Voltaire et d' Bossuet.

3. Le Duc de Bordeaux n'aime pas la guerre,
Mais hélas, la guerre aime le Duc un peu trop,
Si bien qu'à Bordeaux, où la paix ne dur' guerre
Pour un jeune héros, il y a vingt généraux.

Et l'état-major de dresser des plans
Pour attaquer l' Duc de Senlis-se.
Et puis brusquemment laisse tout en plan
Quand les cerisiers refleurissent.

Mais il est bien court, le temps des ceris's
Et les généraux reprendront leur boulot (taratatata)
De là, je conclus que le Duc de Bordeaux,
Vainqueur ou vaincu y laissera sa peau,
Oh, oh, oh,
Ah mesdames, voila le vrai courage,
Ah messieurs, conservez-en l'image,
Voila un beau visage français
Digne du pays de Cambronne et d' Rab'lais.







Le légionnaire





Harmonisation : Xavier Hubaut 
Voir la partition
MP3 : Le bataillonnaire 

1. Il est sur la terre africaine,
Un régiment dont les soldats, dont les soldats
Sont tous des gars qu'ont pas eu d' veine,
C'est la légion et nous voilà, et nous voilà!
Pour ce qui est d' la discipline,
Faut êtr' passé par Biribi par Biribi!
Avoir goûté de la praline,
Et travaillé du bistouri du bistouri

 
Et on s'en fout et après tout
Qu'est-ce que ça fout, out, out, out?
En marchant sur la grand-route,
Souviens toi oui souviens toi ah! ah! ah!
Les anciens l'ont fait sans doute,
Avant toi oui avant toi, ah! ah! ah!
De Gabès à Tataouine,
De Tanger à Tombouctou, ou, ou, ou!
Sac au dos dans la poussière,
Marchons les légionnaires


2. J'ai vu mourir un pauvre gosse,
Un pauvre goss' de dix-huit ans, de dix-huit ans
Fauché par les balles féroces
Il est mort en criant maman, criant maman!
Je lui ai fermé les paupières,
Recueilli son dernier soupir, dernier soupir!
J'ai écrit à sa pauvre mère,
Qu'un légionnair', ça sait mourir, ça sait mourir.

3. Et puisqu'on n'a jamais eu d' veine,
Pour sûr qu'un jour, on y crèv'ra, on y crèv'ra!
Sur cett' putain d' terre africaine,
Enterrés sous le sable chaud, le sable chaud!
Avec pour croix un' baïonnette
A l'endroit où l'on est tombé, on est tombé!
Qui voulez-vous qui nous regrette,
Puisqu'on est tous des réprouvés, des réprouvés ?




Comment cette chanson, qui n'est ni grivoise ni drole, s'est-elle inscrite dans le folklore estudiantin ?

Il semble qu'en Belgique, nous ayons adopté une gestuelle particulière qui amuse beaucoup nos amis français. Elle se chante en monôme les mains sur les épaules du précédent et, au refrain, on désserre la ceinture et on laisse glisser le pantalon sur les chevilles.




Monsieur Champiat, que nous remercions, nous a transmis les informations qu'il a recueillies auprès de René Texier, son ancien professeur.

Cette chanson est non pas celle de la Légion mais "Le Bataillonnaire, celle des Bat'd'Afs, bataillons (légers) d'Afrique où étaient affectés ceux qui accomplissaient une peine de prison (sauf, en principe, pour crimes de sang) et dont c'était la période de conscription. Ils étaient chargés du tracé et de l'entretien des zones les plus rudes du Sahara, plus particulièrement dans le Sud Tunisien. La vie y était telle que ces bataillons furent finalement supprimés. C'était une arme en soi, et non un "supplément" disciplinaire à la Légion.

1. C'était sur la terre africaine,
Un bataillon dont les soldats, dont les soldats,
Sont tous des gars qu'on pas eu d'veine,
C'est les bat' d'Af et nous voilà.
Pour être joyeux, rien de spécial,
Il faut connaître Melun, Poissy, Melun, Poissy,
Ou bien sortir d'une centrale,
C'est d'ailleurs là qu'on nous choisit.

Mais après tout, de tout ça on s'en fout.
En marchant sur la grande route,
Souviens-toi, oui souviens-toi,
Les anciens l'ont fait sans doute,
Avant toi, oui avant toi,
De Gabès à Médenine,
De Gafsa à Tataouine,
Sac au dos dans la poussière,
Marchons bataillonnaire.


2. Mais comme on a jamais eu de veine,
Bien sûr qu'un jour on y crèvera, on y crèvera.
Sur cette garce de terre africaine,
Bien sûr qu'on nous y enterrera.
Avec pour croix une baïonnette
A l'endroit où on est tombé, on est tombé,
Qui voulez-vous qui nous regrette,
Nous ne sommes que des réprouvés.

Petit glossaire:
Joyeux : nom que se donnaient, par ironie, les bataillonneurs.
Melun, Poissy : prisons importantes voisines de Paris
centrale : prison "centrale" où les condamnés accomplissaient leur peine.
Gabès, etc : villes de Tunisie dont Tataouine est restée la plus célèbre (avec Biribi, non cité), et plutôt bagne militaire.

L'histoire de ce chant est fort complexe.
Une certitude: il existe un "petit format" d'une chanson intitulé Le chant des réprouvés qui a été créee par Bordas. Elle est interprétée dans le film "Les réprouvés" consacré aux soldats du Bat'd'Af et datant de 1936.
Les paroles sont signées par Jacques Séverac et la musique par Maurice Naggiar et Lucien Viard.
En voici le texte:


1. C'était sur la terre africaine,
Un bataillon dont les soldats, dont les soldats,
Sont tous des gars qu'on pas eu d'veine,
C'est les bat' d'Af et nous voilà.
Pour être joyeux, rien de spécial,
Il faut connaître Melun, Poissy, Melun, Poissy,
Ou bien sortir d'une centrale,
C'est d'ailleurs là qu'on nous choisit.

Mais après tout, de tout ça on s'en fout.
En marchant sur la grande route,
Souviens-toi, oui souviens-toi,
Les anciens l'ont fait sans doute,
Avant toi, oui avant toi,
De Gabès à Médenine,
De Gafsa à Tataouine,
Sac au dos dans la poussière,
Marchons Bataillonnaires.


2. Mais comme on a jamais eu de veine,
Bien sûr qu'un jour on y crèvera, on y crèvera.
Sur cette garce de terre africaine,
Bien sûr qu'on nous y enterrera.
Avec pour croix une baïonnette
A l'endroit où on est tombé, on est tombé,
Qui voulez-vous qui nous regrette,
Nous ne sommes que des réprouvés.

Mais quéqu'ça fout, quéqu'ça fout, on s'en fout
En marchant sur la grand' route
Souviens-toi, souviens-toi,
Qu'tes anciens sont morts sans doute
Comme toi, comme toi
De Gabès à Médenine,
De Gafsa à Tataouine,
Si nous mordons la poussière,
C'est en Bataillonnaires.

Bordas

Chanson de 1936. 
Les répétitions ne sont pas
chantées et le texte est allégé.

Il est très probable que les "auteurs" se soient inspirés d'un chant préexistant.
Dans un article de Jean-Edmond Lamaze, chef de choeur de l'armée française, on signale que le capitaine Léon Lehuraux dans son ouvrage Chants et chansons de l'armée d'Afrique, éditions Soubiron, Alger, 1933, page 238, cite un chant dont les paroles présentent certaines analogies. Il est tiré de la revue intitulée On se Marakch, jouée pour la première fois à Casablanca en 1910.

En voici un extrait mentionné dans l'article:

1. Y'avait une fois en Algérie
Un officier qui permuta
Pour venir servir sa patrie
Sur les bords de l'oued Bou S'Koura
C'est qu'il voulait v'nir faire la guerre,
Cela se comprend, cela se comprend fort bien
Aux farouches tribus Zaërs :
Et puis enfin c'était son goût,
Ça va bien (bis)
Ce monsieur, la chose est sûre,
Avait une ardente nature
Et disait en s'embarquant :
Ça va bien. (bis) ...

Il semble que les deux couplets datent de la fin du XIXe ou début XXe et qu'un troisième couplet a été intercalé peu après la Seconde guerre mondiale.

Elle se chante en accentuant les assonances et rimes féminines : -ne, -le, etc qui renforcent la cadence.
On trouve ainsi, après la guerre, cette chanson sous la forme suivante:

1. Il est sur la terre africaine
Un bataillon dont les soldats, dont les soldats
Sont tous des gars qu'ont pas eu d' veine
C'est les Bat' d'Af', oui nous voilà, oui nous voilà!
Pour êtr' Joyeux, chose spéciale
Y faut sortir d' la rue d'Poissy, d' la rue d'Poissy
Ou bien encor' d'une Centrale
C'est d'ailleurs là qu'on nous choisit, qu'on nous choisit!

Mais après tout, qu'est-ce que ça fout!
Et l'on s'en fout!
En marchant sur la grand' route
Souviens-toi, oui souviens-toi, oui souviens-toi
Les Anciens l'ont fait sans doute
Avant toi, oui avant toi, ah! ah! ah! ah!
De Gabès à Tataouine
De Gafsa à Médiaoui-ine
Sac au dos dans la poussiè-ère
Marchons bataillonnaires!



2. Mais comme on n'a jamais eu d' veine
Pour sûr qu'un jour on y crèv'ra, on y crèv'ra!
Sur cett' putain d' terr' africaine
Dans le sable on nous enfouira, enfouira
Avec pour croix un' baïonette
A l'endroit où nous somm's tombés, nous somm's tombés
Qui voulez-vous qui nous regrette
Puisque c'est nous les réprouvés, les réprouvés.

3. Vous qui du haut de vos fenêtres,
Bourgeois nous regardez passer, r'gardez passer
Vous tremblez toute votre graisse
Car oui c'est nous les réprouvés, les réprouvés
Mais gardez bien vos femm's, canailles,
Car un jour nous vous les prendrons, vous les prendrons
Et ce jour là vaille que vaille
C'est vous qui irez en prison, oui en prison!

Voici à présent une version bien plus moderne: "Parachutistes" intitulée "En passant par la portière".

C'est probablement le premier chant para car le cimetière de Maison-Blanche à Baraki près d'Alger était l'endroit où la 602e Compagnie d'Infanterie de l'Air, ancêtre du 1er RCP, enterrait ses morts. Elle y tint garnison à partir de 1937. Si le parachutiste sait affronter le danger avec courage, la peur, cette vieille compagne est toujours présente. Particulièrement au moment de s'élancer dans le vide, car il sait que la chute peut être fatale. L'humour est alors un bon moyen de surmonter la peur qui saisit même les meilleurs à cet instant.

1. Y'avait là-bas en Algérie
Un régiment dont les soldats, dont les soldats
A chaque instant risquaient leur vie.
Parachutiste nous voilà, oui nous voilà.
Pour faire partie de cette élite
Il faut bien être un peu cinglé, un peu cinglé
Il faut surtout pas s'faire de bile
Savoir bien boire et s'amuser, et s'amuser.

Et on s'en fout, et après tout
Qu'est-ce que ça fout, la ,la, la
En passant par la portière
Parachutiste souviens-toi, oui souviens-toi
Qu'un jour il pourrait se faire
Malgré toi, oui malgré toi, la, la, la
Qu'après une chute libre
Tu auras cessé de vivre, la, la, la
Entorché dans l'atmosphère
Tu tomberas comme une pierre.


2. J'ai vu mourir un pauvre diable
A peine âgé de dix-huit ans, de dix-huit ans
Son pépin s'était mis en torche.
Il est mort en criant maman, criant maman.
Je lui ai fermé les paupières,
Recueilli son dernier soupir, dernier soupir
Et j'ai écrit à sa pauvre mère
Comme un para savait mourir, savait mourir.

3. Et comme on n'a jamais eu d'veine
Un jour l'pépin s'ouvrira pas, s'ouvrira pas
Sur cette putain d'terre africaine
A cent à l'heure tu t'écraseras, tu t'écraseras.
On ramassera tes côtelettes,
Dans un grand sac à effets chauds, à effets chauds.
On dira saperlipopette
Ce gazier-là n'a pas eu d'pot, n'a pas eu d'pot.

4. On te mettra entre quat'planches
Entortillé dans ton pépin, dans ton pépin
Au cimetière de Maison Blanche
T'auras la gueule de tes copains, de tes copains.
T'auras les honneurs militaires
Et l'on mettra sur ton tombeau, sur ton tombeau
La croix de guerre réglementaire,
Et ce jour sera le plus beau, oui le plus beau.

D'après l'Anthologie du chant militaire français, parue aux éditions Grancher en 2000
et recherches personnelles.




En Belgique, quatre "poètes" de la Corporatio Bruxellensis! (H.b.n.n, G.ll..rd, B.d..ne et Cr.vc..r) ont écrit une version typiquement belge intitulée Le VMO, chanson comique, qu'il faut éviter de chanter dans le Nord du pays; le VMO (Vlaamse Militante Orde) est une organisation qui n'a guère le sens de l'humour.


Il est sur la terr' flamingante
Un groupuscule dont les soldats, dont les soldats
N'ont pas d' problème avec la langue,
Le VMO, oui nous voilà, oui nous voilà!
Pour ce qui est d' la discipline,
Faut êtr' passé par les Fourons, par les Fourons!
Etre revenu par Comines,
Avoir planté le coq wallon, le coq wallon.

Et on s'en fout,
Et la police est avec nous, ous, ous, ous!
En paradant sur les plages
Souviens-toi de Flandria, ah, ah, ah!
Ce serait vraiment dommage,
De ne pas rosser les rats, ah, ah, ah!
De Raversijde à Koksijde,
Les anciens sont toujours là, ah, ah, ah!
Prends ton casque et ta matra-aque,
Marchons les démocrates








Le fils père

paroles: Georgius
musique: Pierre Chagnon


Mp3 : Michèle Bernard 

1. Il était beau il s'app'lait Jul's
Il n'avait pas encor fauté,
Quand un beau soir au crépuscule
Par le désir, il fut hanté
Juste à ce moment, un' brunette
Qui descendait de l'autobus
Lui dit: "Viens-tu dans ma chambrette?
J'habite au quartier Picquepus"

Amour, amour, tu fais fair' des folies
Amour amour, tu nous fais bien du mal


Il soupira: "Si je faute, ma mie,
M'épous'ras-tu?" "Oui, dit-ell' c'est fatal !"
Mais quand il s'eut donné bêt'ment
Elle lui dit: "Maint'nant, va-t-en"
Et le j'ta hors de sa maison
Sans lui rendre son pantalon
C'est alors qu'il comprit
Sa honte et sa misère,
Un malaise le prit
Jul's était fils-e-pè-ouè-re !

2. Afin d' dissimuler sa faute
Il prit d'affreuses précautions,
Il se serra les entrecôtes
Et fit élargir ses cal'çons.
Mais un jour il perdit sa place,
Le patron l'ayant fait app'ler
Lui dit: "T'as fauté, je te chasse
Faut pas d' fils père à l'atelier"


Parlé: Mon Dieu!

Pour oublier, il sombra dans l'orgie,
Il but, du cidre et de l'Urodonal
Alors à Montmartre, là-haut
On l' vit rouler dans le ruisseau
Pendant que d'affreux noctambules
Venaient tirer l'oreille à Jul's
Et de son pauvre corps
Les filles abusèrent...
On n'est pas respecté
Quand on est un fils-e-père.

3. Un soir, dans un' louche officine,
Il entra, décidé à tout
Il vit un' femme, un' gourgandine
Qui s'app'lait madam' Guettautrou
Pour fair' disparaître les traces
De la faute du pauvre gueux
Ell' lui charcuta la carcasse
En se servant d'un' pelle à feu.

Parlé: Oh quelle horreur!

Le pauvre gars faillit perdre la vie
Hier, il est sorti de l'hôpital
Et maintenant pâle et flétri,
Le ventre et les seins pleins de plis,
Sur le Sébasto on peut l' voir
Il est dev'nu fils du trottoir !

Moralité:
Mariez-vous, jeunes gens
Avant d' vous laisser faire
Ne faites pas comm' Jul's
Le malheureux fils père...



pf

Cette chanson dont les paroles sont de Georgius, date de 1920 mais, curieusement, elle ne fut jamais chantée par son parolier.
La partition précise :

Depuis peu, elle a été reprise par Pierre Perret, mais sur un nouveau timbre.

L'extrait du Fils-père, que nous vous avons présenté plus haut, est chanté par Michèle Bernard sur l'air original de Pierre Chagnon.







La femme aux morpions

musique: Ernest Dumont


Mp3 : Georgette Plana 

C'est la femme aux morpions,
Cell' qui s'gratt' le con
Bien qu'ell' soit bell' gosse
Tous ceux qui l'ont baisée
Ne peuvent plus bander
Pour un' pièc' de vingt ronds
Ell' suc' sans façon
Les pin's les plus grosses
La reine du suçon,
C'est la femme aux morpions.

Quand j' l'ai rencontrée la femme aux morpions,
C'était dans un bal, près des Butt's Chaumont,
Au son d'un piano mécanique
Qui f'sait plus d'bordel que d'musique
J'invitai la môme à faire un tango;
Son peignoir ouvert laissait voir sa peau
Et d'vant cett' superbe poule
Je faillis perdre la boule
Quand je la baisai sur son escalier
Le voisin du d'ssous se mit à chanter.




La parodie d'une chanson de 1912 intitulée La femme aux bijoux dont les paroles sont de Ferdinand-Louis Bénech et la musique d'Ernest Dumont. Elle a été créée par Marcellys et reprise par de nombreux interprètes: Damia, Anny Flore, Aimé Doniat, René de Godewarsvelde et l'extrait présenté plus haut est interprété par Georgette Plana.







Conseils d'une putain à sa fille

MP3 : Bacchus 

Refrain:

Adieu, fais toi putain,
Va t-en gagner ta vie
Adieu, fais toi putain,
Va-t en gagner ton pain


1. Tu vas donc quitter la famille
Pour t'engager dans un boxon;
Je ne t'empêche pas ma fille
Puisque c'est là ta vocation
Ecout' les conseils d'une mère
Qui avant toi fit le métier:
Tu n'as jamais connu ton père
C'était peut-êtr' tout le quartier

2. Évite surtout la vérole,
Chancres poulains et caetera
Et ne crois pas sur sa parole
Le baiseur qui te la foutra;
Regarde bien dans sa culotte
Si son vit est bien entret'nu
Et retrousse bien la calotte
Avant de t' la fourrer dans l' cul

3. Évite bien la maquerelle
Et encor' plus le maquereau;
Tâche de te conserver belle
Et pour ça n'évite pas l'eau:
Cent fois par jour, dans ta cuvette,
Lave-toi l' con bien proprement
Et sur la table de toilette
Que l'onguent gris soit abondant.

4. Évite bien une grossesse,
Ne te laisse pas engrosser,
En resserrant un peu les fesses
Il n'y a guère de danger
Avec cett' chèr' capote anglaise,
Reçois ma bénédiction
Et maintenant, baise à ton aise
Et ne crains plus que les morpions.




L'origine de la chanson se trouve dans le Panier aux ordures; elle y figure sous le titre Crème des vertus, une parodie de "La Grâce de Dieu" qui se chantait sur l'air de "Tu vas quitter notre montagne".

Bien que fort différent, l'esprit est le même:

Va, Crème des vertus,
Fair' jouer l' plus beau des culs.

} (bis)
Adieu,
A la grâce de Dieu !
(ter)

1. Tu vas partir, pauvre Marie,
Pour visiter le grand Paris;
Ta mère est là qui t'en supplie,
Suis ses conseils et ses avis;
Mais en partant, j' crains que tu n'baises
Avec un muff' qui t' coll' le plomb;
Prends beaucoup de capot's anglaises
Avec ma bénédiction.

2. En arrivant dans la grand' ville,
Choisis un bordel de bon goût,
Ou l'on soit paisible et tranquille,
Ou l'on paye dix francs par coup.
Quand être sag' tu seras lasse,
Tu t'échapp'ras un p'tit instant,
Et pourras faire mainte passe
Dont tu m'enverras le montant.

3. N' prends pas d'amant, je t'en conjure,
Dans un bordel, c'est là le pis;
Soigne toujours bien ta parure,
Lave souvent ton clitoris.
Par ces moyens tu f'ras fortune;
Aprés cinq ou six ans d' labeur,
Tu reviendras dans la commune
Goûter en paix le vrai bonheur.

4. Six mois après, sur sa parole,
La pauvre enfant baisa si mal,
Qu'il s'ensuivit une vérole
Qui la foutit à l'hôpital.
La pauvre mer', triste et chagrine,
Les mains croisées sur son chevet,
Disait: "Se peut-il qu'une pine
Produise un si mauvais effet ?...

Viens, Crème des vertus,
N' fais plus jouer ton cul...
A Paris, dis adieu.
A la grâce de Dieu !
Adieu, à la grâce de Dieu !
(bis)

La parenté est évidente et la comparaison des textes est intéressante.


À titre documentaire, voici la chanson "A la Grâce de Dieu" qui a été pastichée :

1. Tu vas quitter notre montagne
Pour t'en aller bien loin hélas
Et moi ta mère et ta compagne,
Je ne pourrai guider tes pas.
L'enfant que le ciel vous envoie,
Vous le gardez, gens de Paris,
Nous pauvres mères de la Savoie,
Nous le chassons loin du pays
En lui disant adieu,
A la grâce de Dieu.

2. Ici commence ton voyage;
Si tu n'allais pas revenir,
Ta pauvre mère est sans courage
Pour te quitter pour te bénir
Travaille bien, fais ta prière.
La prière donne du cœur
Et quelquefois pense à ta mère,
Cela te portera bonheur,
Va mon enfant adieu
A la Grâce de Dieu.

3. Elle s''en va, douce exilée,
Gagner son pain sous d'autres Cieux;
Longtemps, longtemps dans la vallée,
Sa mère la suivit des yeux
Mais lorsque sa douleur amère
N'eut plus sa fille pour témoin,
Elle pleura la pauvre mère.
L'enfant qui lui disait de loin:
Ma bonne mère adieu,
A la Grâce de Dieu.

L'air d' A la grâce de Dieu diffère très sensiblement de la mélodie acuelle d' Adieu, fais toi putain