Les cent louis d'or

Arrangement : Xavier Hubaut 

1. Un soir étant en diligence,
Sur une route entre deux bois,
Je branlais avec assurance
Une fillette au frais minois
J'avais retroussé sa chemise
Et mis le doigt sur son bouton
Et je bandais malgré la bise,
A déchirer mon pantalon
Pour un quart d'heure entre ses cuisses
Un prince eût donné un trésor,
Et moi j'aurais, Dieu me bénisse,
J'aurais donné cent louis d'or!

2. Las de branler sans résistance,
La tête en feu la pine aussi,
Je pris sa main quelle indécence!
Et la mis en forme d'étui
Je jouissais à perdre haleine
Je déchargeai, quel embarras!
Sa main sa robe en étaient pleines
Mais cela ne suffisait pas
Sentant rallumer ma fournaise,
Je lui dis: " Tiens fais plus encore,
Sortons d'ici que je te baise
Je te donne cent louis d'or! "

3. La belle alors, toute confuse,
Me répondit ingénument:
" Pardon Monsieur, si je refuse
Ce que vous m'offrez galamment;
Car j'ai juré de rester sage
Pour mon fi-ancé, mon mari
De conserver mon pucelage,
Il ne sera jamais qu'à lui "
" Tu n'auras pas le ridicule,
Dis-je, d'arrêter mon essor,
Permets au moins que je t'encule,
Je te promets cent louis d'or! "

4. Au premier relais sur la route,
Nous descendîmes promptement
Au cul il faut que je te foute,
Ne pouvant te foutre autrement
Dans une auberge nous entrâmes,
Tout s'y trouvait bon feu, bon lit
Brûlant d'amour, nous couchâmes:
Je l'enculai toute la nuit
Mais pour changer de jouissance,
Je lui dis: "Tiens, fais plus encore',
Livre ton con et tout d'avance
Je te promets cent louis d'or!"

5. "Je veux bien sans plus de harangue,
Dit-elle en me suçant le gland
Livrer mon con à votre langue,
Pour ne pas trahir mon serment "
Aussitôt, placés tête bêche
Comme deux amants dans le lit,
Avec ardeur, moi je la lèche
Pendant qu'elle suce non vit
Mais la voyant bientôt pâmée
Je puis lui ravir son trésor,
Et je me dis, la pine entrée:
Je gagne mes cent louis d'or!

6. Huit jours après cette aventure,
J'étais de retour à Paris
Ne prenant plus de nourriture
Restant tout pensif au logis
A la gorge, ainsi qu'à la pine,
J'avais, c'était inquiétant,
Chancres poilus, on le devine,
Et chaude-pisse, en même temps
Prenant le parti le plus sage,
Je me transportai chez Ricord(1),
Qui me dit: "Un tel pucelage,
Vous coûtera cent louis d'or!"


L'illustration est extraite de
Chansons Cochonnes
Chansons estudiantines traditionnelles
adaptées en bandes dessinées par L-M
CARPENTIER - MALIK - JIDÉHEM - KOX
couleurs LAURENT album 48 pages
cartonné couleur format 22-29cm
Editions Topgame



(1) Le docteur Ph. Ricord, chirurgien et urologue français, et par ailleurs membre de la société chansonnière Le Caveau, peut être considéré comme le père de l'étude de la syphilis; il exerçait comme chirurgien chef à l'Hôpital du Midi.

D'après l'édition des Fleurs du Mâle par le GRACE (1984)

Il s'agit d'un pastiche d'une chanson de Pierre Dupont: Les Louis d'or.
On trouve la chanson originale dans le tome premier de l'ouvrage intitulé Chants et chansons (poésie et musique) publié en 1851; la mélodie de cette chanson n'a pratiquement pas changé; on comparera avec la partition de l'ouvrage qui vient d'être mentionné ou avec celle des Chants et chansons populaires de la France, vol.2. fasc.63 publié en 1858.

En cette même année 1858, paraît Anciennes et nouvelles Chansons joyeuses et populaires par l'élite des auteurs chansonniers. On y trouve déjà une parodie intitulée Alix ou les cent louis d'or écrite par A. Halbert:

1. Hier le seigneur du village
Surprit Alix dans le vallon;
Séduit par son air deux et sage,
Il lui tint ce propos, dit·on:
Je brûle d'une ardeur sincère,
Et t'aime, Alix, depuis longtemps !
Enfant, Dieu te créa pour plaire,
Reponds à mes deux sentiments;
Pour moi, ton amour, ô bel ange !
Est un ineffable trésor;
Accepte le mien en échange,
Et j'y joindrai cent louis d'or.

2. A cinq ans on verse des larmes;
A dix, sont les jeux innocents;
A douze, les tendres alarmes;
Mais pour aimer, il faut quinze ans.
De tes quinze ans fais bon usage,
Des doux plaisirs c'est la saison;
Nul ne t'aimera davantage,
J'en fais serment par mon blason.
Pour moi, ton amour, ô bel ange !
Est un ineffable trésor;
Accepte le mien en échange,
Et j'y joindrai cent louis d'or.

3. Nous goûterons, ma douce amie,
Plaisir par-ci, bonheur par-là;
Nous mènerons joyeuse vie,
Riant, chantant, et caetera.
D'amour, nous chômerons la fête,
II faut que la joie ait son cours;
Alix, à m'aimer es-tu prête,
Car je veux t'adorer toujours ?
Pour moi, ton amour, ô bel ange !
Est un ineffable trésor;
Accepte le mien en échange,
Et j'y joindrai cent louis d'or.

4. Monseigneur, répond la fillette,
Passez, passez votre chemin;
Mes brebis, mon chien, ma houlette,
De mes jours tracent le destin:
Puis j'aime tant ma vieille mère,
Que son amour seul me suffit;
Le plus grand des biens sur la terre,
C'est l'honneur sous un pauvre habit !
A mon cœur, j'entends mon bon ange,
Conseiller en sage Mentor,
De rejeter pareil échange,
Oui, gardez vos cent louis d'or.

L'auteur de la musique pose problème. Il est mentionné : "Musique de P. Dupont ou Air de Fleur des champs" !
Cela semblerait indiquer que la chanson de Dupont était écrite sur un air plus ancien. De fait,nous avons retrouvé, en 1842, deux ouvrages rassemblant de œuvres des chansonniers: Le Flambeau des chansonniers et l'Echo des chansonniers français. Dans le premier, on trouve La prière à la Madone sur l'air de Fleur des champs et dans le second, une autre intitulée tout simplement... Fleur des champs.

Par la suite, dans Le nouveau Parnasse satyrique du dix-neuvième siècle on trouve à la page 216, une Parodie des "Louis d'or" de Pierre Dupont.

Les deux premiers couplets nous sont parvenus quasi inchangés, mais le troisième a disparu et a été remplacé par quatre nouveaux couplets: moins de goujaterie (le belle a été payée), mais une sérieuse mise en garde envers les conséquences d'un excès de confiance !


On trouve dans Le Panier aux Ordures de 1866, un quatrième couplet, épilogue non publié dans le Parnasse satyrique:

Deux mois après cette aventure,
Dont j'ai le souvenir récent,
J'avais une triste figure,
Car je n'étais pas bien portant :
Chancres, poulains et chaude-pisse,
Ornaient mon vit, quel embarras !
Je buvais chiendent et réglisse,
Et cela ne suffisait pas.
Au beau milieu de ma souffrance,
Je disais: "Si l'on m' voit encore
Baiser un' fille en diligence
Je donnerai cent louis d'or."