L'illustration est extraite de Chansons Cochonnes
Chansons estudiantines traditionnelles adaptées en bandes dessinées par
L-M CARPENTIER - MALIK - JIDÉHEM - KOX couleurs LAURENT
album 48 pages cartonné couleur format 22-29cm Editions Topgame
1. Il est minuit,
La femme du roulier
S'en va de porte en porte,
De taverne en taverne,
Pour chercher son mari
Tireli,
Avec une lanterne.
}
(bis)
2. "Madam'l'hôtesse,
Où donc est mon mari?"
"Ton mari est ici,
Il est dans la soupente,
Il y prend ses ébats,
Tirela,
Avec notre servante."
}
(bis)
3. "Cochon d'mari,
Pilier de cabaret,
Ainsi tu fais la noce,
Ainsi tu fais ripaille,
Pendant que tes enfants,
Tirelan,
Sont couchés sur la paille."
}
(bis)
4. "Et toi la belle,
Aux yeux de merlan frit,
Tu m'as pris mon mari
Je vais te prendr'mesure
D'un' bonn' culott'de peau,
Tirelo,
Qui ne craint pas l'usure."
}
(bis)
5. "Tais-toi, ma femme
Tais-toi, tu m'fais chi-er
Dans la bonn'société
Est-ce ainsi qu'on s'comporte?
J'te fous mon pied dans l'cul
Tirelu,
Si tu n'prends pas la porte."
}
(bis)
6. "Pauvres enfants,
Mes chers petits enfants,
Plaignez votre destin
Vous n'avez plus de père;
Je l'ai trouve couché
Tirelé,
Avec une autre mère."
}
(bis)
7. "Il a raison,
S'écrièr'nt les enfants,
D'aller tirer son coup
Avec la cell'qu'il aime,
Et quand nous serons grands,
Tirelan,
Nous ferons tous de même."
}
(bis)
8. "Méchants enfants,
Sacrés cochons d'enfants",
S'écrie la mèr'furieuse
Et pleine de colère
"Vous serez tous cocus
Tirelu,
Comm'le fut votre père."
}
(bis)
Cette chanson était au répertoire du Caveau des oubliettes rouges, situé dans le Quartier Latin au n°11 rue Saint-Julien-le-Pauvre dans la plus ancienne cour de Paris.
L'origine de cette chanson semble être: La femme d'un libertin, qui a donné naissance à diverses variantes qui se retrouvent jusqu'au Canada. La mélodie en est assez différente; toutefois le refrain rappelle celui chanté dans la version actuelle.
1. Y a rien d'plus misérable
Qu'la femme d'un libertin!
Y a rien d'plus misérable
Qu'la femme d'un libertin!
Elle s'en va, d'auberges en auberges,
En cherchant son mari, nom de d'là!
Avec une lanterne.
Elle s'en va, d'auberges en auberges,
En cherchant son mari, nom de d'là!
Avec une lanterne.
2. "Bonjour, Madame l'hôtesse,
Mon mari est-il là?
Il est là-haut, dans la plus haute chambre;
En train d'se divertir, nom de d'là!
Avec notre servante."
3. Cette femme, cette pauvre femme,
Dans la chambre elle monta:
"Que fais-tu là, méchant ivrogne ?
T'es à te divertir, nom de d'là!
Chez nous, il n'y a pers.
4. Ma femme, ma pauvre femme,
Retourne en ta maison!
En ta maison, tu feras ta cuisine;
Et moi, pendant ce temps, nom de d'là
Je viderai mes chopines."
5. Cette femme, cette pauvre femme,
Chez elle s'en retourna:
" Ah, mes enfants! vous n'avez plus de père;
L'est à se divertir, nom de d'là!
Avec une autre mère!
6. Ma mère, ma pauvre mère,
Nous savons tout cela.
Nous savons bien ce que fait notre père;
Et quand nous serons grands, nom de d'la!
Nous ferons tous de même."
7. Cette femme, cette pauvre femme,
Alors elle s'écria:
"Si j'avais su, en passant la rivière,
J'aurais jeté dedans, nom de d'là!
Mes enfants et leur père!"
Cette histoire de La femme d'un libertin et ses variantes les plus connues (telle que La femme du roulier) sont souvent victimes d'interprétations pour le moins contestables. En effet, sous prétexte que la tradition estudiantine les a accaparées, pour en faire les piliers d'un répertoire de corps de garde, elles font désormais figures d'apologies de la débauche masculine; ce qui, au regard d'une lecture attentive du texte, est un contresens total. Loin d'être une invitation au libertinage, cette chanson, empreinte d'un désespoir total, ressemble plutôt à un constat d'échec. Sur toute la ligne; puisque les enfants ne valent pas mieux que leur père.
Voici une autre version recueillie dans le Berry vers 1850, par Sainte-Beuve, qui n'est pas spécialement connu pour ses recherches sur la culture traditionnelle !
Cet attrait ponctuel s'explique par le fait que le critique fut assez lié avec George Sand et Prosper Mérimée, lesquels explorèrent abondamment le patrimoine populaire des environs de Nohant-Vic et s'efforcèrent de faire partager leur enthousiasme aux amis qui, l'été, venaient passer quelques jours de vacances chez la baronne Dudevant. Des amis d'autant plus faciles à convaincre que les travaux de Gérard de Nerval avaient créé un véritable engouement pour le sujet, dans les milieux littéraires et artistiques. Ainsi vit-on des gens comme Chopin, carnet de musique en main, noter des mélodies entendues au hasard d'une promenade.
La voici telle qu'il ramena et fut publiée dans les Instructions relatives aux poésies populaires de la France en 1853:
1. La jeune femme
(C'était la femme du roulier)
S'en va dans tout le pays,
Et d'auberge en auberge,
Pour chercher son mari,
Tireli,
Avec une lanterne.
2. Madam' l'hôtesse,
Mon mari est-il ici ?
Oui, madame, oui il est là,
Là, dans la chambre haute,
Et qui prend ses ébats,
Tirela,
Avec une servante.
3. Allons, ivrogne,
Retourne voir à ton logis
Retourne voir à ton logis
Tes enfants sur la paille
Tu manges ton bien,
Tirelin,
Avecque des canailles.
4. Madam' l'hôtesse,
Apportez-moi du bon vin,
Apportez-moi du bon vin,
Là, sur la table ronde,
Pour boir' jusqu'au matin,
Tirelin,
Puisque ma femme gronde.
5. La pauvre femme
S'en retourne à son logis,
Et dit à ses enfants :
Vous n'avez plus de père.
Je l'ai trouvé couché
Tirelé
Avec une autre mère.
6. Eh bien! ma mère,
Mon père est un libertin;
Mon père est un libertin;
Il se nomme Sans géne,
Nous sommes ses enfants,
Tirelan,
Nous ferons tout de même.
Ce ne semble pas être la meilleure version ! On remarque une répétition du 2e et 3e vers présente uniquement dans les couplets 3, 4 et 6.
La version retenue dans le Romancero populaire de la France et publiée en 1904 semble bien meilleure.
1. Triste et dolente, la femme du roulier
S'en va dans le pays, de taverne en taverne,
Pour chercher son mari avec une lanterne.
2. "Bonsoir l'hôtesse, mon mari est-il là ?
-Oui, Madame, il est là; dans la plus haute chambre,
A prendre ses ébats avec une servante.
3. Ah! chien d'ivrogne, pilier de cabaret!
Tu manges tout ton bien avecque des canailles,
Et moi et tes enfants, nous sommes sur la paille!
4. Dame l'hôtesse, apportez-nous du vin,
Apportez-nous du vin dessus la table ronde,
Pour boire à la santé de ma femme qui gronde!"
5. La pauvre femme s'en retourne au logis
Et dit à ses enfants: "Vous n'avez plus de père!
Je l'ai trouvé couché avec une autre mère!
6. Hé! bien ma mère! hé! bien, que dites-vous?
Nous savons bien [pour] sûr, que nous avons un père!
Il fait le libertin, nous ferons tous de même !"
Dans le Sud-Ouest, le routier libertin devient tambour, et la chanson prend un rythme plus martial, qui la rattache d'évidence au répertoire de marche.
1. C'était la femme d'un tambour,
Qui s'en allait de caserne en caserne
Pour chercher son mari,
La li ri,
Avec une lanterne.
2. "Bonjour, Madame, mon mari est-il là?
il est là-haut, dans la plus haute chambre,
Boire à s'y diverti,
La li ri,
Avec notre servante.
3. Ah! gueux d'ivrogne, coureur de cabarets,
Tu manges mon bien avec les jeunes filles!
Tu t'en repentiras,
La li ra,
Le restant de ta vie.
4. Madame l'hôtesse, qu'on m'apporte du vin!
Je suis ici, à cette table ronde,
Boire à m'y diverti,
La li ri,
Ne faut point qu'on me gronde!"
5. La pauvre femme s'en retourne au logis,
Triste et versant bien des larmes amères;
A dit à ses enfants,
La li ran :
"Vous n'avez plus de père!
6. Hé! bien ma mère! hé! bien, que dites-vous?
Nous savons pour sûr, que nous avons un père!
Il fait le libertin
La li rin,
Nous ferons tous de même !"
7. La pauvre femme, elle s'en va sous les ponts,
Se jette à l'eau, à l'eau de la rivière.
A dit à ses enfants,
La li ran:
"Vous n'avez plus de mère!"
D'après L'Anthologie de la Chanson Française de Marc Robine et La Chanson populaire de J.-B.Weckerlin.
et recherches personnelles.
Signalons une autre version reprise dans "Chansons populaires du Nivernais et du Morvan" recueillies par Achille Millien et J.G. Penavaire.
1. Triste galant, la femm' du vieux tambour,
Qui a le cul de plâtre et les fess's de velours.
Elle s'en va d'auberge en auberge,
Pour chercher son mari, ladéra,
Avec une lanterne.
2. "Bien l'bonjour, Madame l'hôtesse,
Bonjour, mon mari est-il là ?"
"Il est là-haut dans la plus haute chambre,
Qui s' divertit fort bien, ladéra,
Avec notre servante."
3. Ah ! t' voilà ivrogne, pilier de cabaret,
Tu dépens's ton argent, c'est pour fair' rir' les filles,
Tu t'en repentiras, ladéra,
Tout le temps de ta vie.
4. Retourne t'en, retourne t'en, ma femme,
Moi, j'suis ici assis, auprès d' cette petite table ronde,
J' dépense bien mon argent, ladéra,
J'entends qu'personn' me gronde.
5. La pauvre femme, elle va à sa maison
Elle dit à ses enfants, ses pauvr's petits enfants:
"Vous n'avez plus de père !
Là-haut il s'divertit, ladéra,
Avec une autre mère."
6. Eh là ! ma mère, qu'est-c'que vous dites là ?
Eh ! nous le savons bien qu'nous avons un père,
Qu'il est débauché,
Et quand nous serons grands, ladéra,
Nous en ferons de même.
Connue également sous le titre "La femme du cordonnier", cette chanson multiforme possède également une version en Ille et Vilaine que l'on trouve dans le tome V du Recueil de chansons populaires (1887) de Rolland sous le titre :
Le Bambocheur
1. Il n'y a rien d' plus triste
Qu'un homme qu'est bambocheur.
Quand il va d'auberge en auberge
Sa femme va le chercher,
Nom de nom,
Avec une lanterne.
2. Bonsoir, madame l'hôtesse,
Mon mari est-il ici ?
Il est en haut, dans la chambre,
En train de s' diverti,
Nom de nom,
Avec notre servante. ?
3. La femme, la bonne femme,
Dans la chambre elle monta :
Te voilà donc notr' homme
En train de t' diverti
Nom. de nom,
Chez nous n'y a personne.
4. Ma femme, ma bonne femme,
Retourne feu chez toi
Pour y faire la cuisine,
Et moi je reste ici,
Nom de nom,
A caresser les filles.
5. La femme, la bonne femme.
S'en retourne en pleurant.
Ell' dit à ses enfants :
Vous n'avez plus de père
Il est à s' diverti,
Nom de nom,
Avec une bergère.
6. Ma mère, ma bonne mère,
N'y pleurez donc pas tant.
Quand nous serons tous grands
Pour gagner notre vie,
Nous ferons comm' papa.
Nom de nom,
Nous caress'rons les filles.
7. Hélas ! si j'avais su
En passant la rivière
Je les aurais noyés
Nom de nom,
Les enfants de leur père.
Curieusement les couplets 5 et 6 comportent un vers supplémentaire
Sous un titre identique mais avec un texte totalement différent, elle a été enregistrée en 2005 par Evelyne Girard:
1. Triste galant', la femme du vieux tambour,
Qui a le cul de plâtre et les fesses de velours.
Elle s'en va d'auberge en auberge,
Pour chercher son mari, ladéra,
Avec une lanterne.
2. "Bien le bonjour, Madame l'hôtesse, bonjour,
Recevez mon bonjour, mon mari est-il là ?"
"Il est là-haut dans la plus haute chambre,
Qui s 'divertit fort bien, ladéra,
Avec notre servante."
3. "Bonjour ivrogne, pilleur de cabaret,
Toi t'es ici, tu fais de bonne chère,
Moi et mes enfants, nous sommes à la misère."
4. "Va-t'en ma femme, va-t'en vers tes enfants,
Moi j'suis ici, auprès d'ma mie ma blonde,
Et je n'entends pas que personne m'y gronde."
5. La pauvre femme, s'en va toujours pleurant :
"Pleurez, mes enfants, le sort de votre père,
Devant qu'il soit jour, vous n'aurez plus de mère."
6. "Pourquoi ma mère, que vous dites cela,
Nous savons bien que nous avons un père,
Il est bambocheur, nous en serons de même."
On retrouve ainsi le vieux tambour. Mais, à nouveau, une version assez incohérente du point de vue de la versification !
1. Ah! c'est la femme
C'est la femm' du roulier
Qui va de porte en porte
Et de taverne en taverne
Pour chercher son mari
Tireli
Avec une lanterne.
2. Madame l'hôtesse
Mon mari est-il là
Oui madame il est là
Il est dans la soupente
En train de tirer un coup
Tirelou
Avec une servante.
3. Ah! chien d'ivrogne,
Retourne à ton logis
T'es là que tu t'emplis
T'es là que tu ripailles
Pendant que tes enfants
Tirelan
Sont couchés sur la paille.
4. Et toi la belle
Aux yeux de merlan frit
Tu m'as pris mon mari
Je vais te prendre mesure
D'une bonne culotte de peau
Tirelo
Qui ne craint pas l'usure.
5. Tais-toi ma femme
Ferme ta gueule, tu m' fais suer
Dans la bonne société
Est-ce ainsi qu'on s'comporte
J' te fous mon pied au cul
Tirelu
Si tu n' prends pas la porte.
6. La pauvre femme
S'en retourne au logis
Et dit à ses enfants
Vous n'avez plus de père
Je l'ai trouvé couché
Tirelé
Avec une autre mère.
7. Il a raison
S'écrièr'nt les enfants
Il a raison de baiser
Avec celle qui l'aime
Et quand nous serons grands
Tirelan
Nous ferons tous de même.
8. Charogn' d'enfants
Sacré cochons d'enfants
Lorsque vous serez grands
Croyez-en votre mère
Vous serez tous cocus
Tirelu
Comme Monsieur votre Père.
1. Un jour l'ivrogne s'en va-t-au cabaret (bis)
Sa femme, qui le cherche d'auberge en auberge,
Tient toujours dans sa main un' branche de gendarme.(*)
2."Bonjour l'hôtess', mon mari est y ici ? (bis)
Ah! montez dans ma chambr', dans ma plus haut' chambre,
Vous le retrouverez en grande réjouissance.
3. Dis-moi, l'ivrogne, que fais-tu donc z'ici (bis)
Contre cett' table ronde, cett' grand' table ronde ?
Tu dépenses ton bien, puis tes enfants qui grondent !
4. Ma pauvre femme, je te dis en secret (bis)
Contre la table ronde, la grand' table ronde,
Quand je bois d'ce bon vin, je ne veux pas qu'on m'gronde."
5. Sa pauvre femme s'en r'tourne à la maison (bis)
" Pleurez, mes enfants, pleurez, le sort de votr' mère.
Ah ! pleurez maintenant, vous n'avez plus de père !"
(*) une branche de gendarme = une trique, une matraque.
Très proche de notre version, bien qu'expurgée : plus question de filles ! Le mari se borne à boire, mais la servante de l'auberge a disparu !
Dans une autre version canadienne, on retrouve le même thème mais une certaine Rosalie, dont on ignore le rôle exact, apparaît à chaque couplet. Cette version est intitulée:
La femme du soldat
Mp3 : Le rêve du diable
1. C'était la femme, la femme du soldat (bis)
Tous les soirs, a s'promène de taverne en taverne
Et en cherchant son mari, Rosalie, avec une lanterne
2. "Bonsoir l'hôtesse, mon mari est-il ici ?" (bis)
"Montez, montez en haut dans la plus haute chambre
Vous le trouv'rez couché, Rosalie, avecque la servante"
3. "Bonsoir l'ivrogne, piliere de cabaret (bis)
Tu dépenses tout ton bien à faire la bonne chère
Et tes petits enfants, Rosalie, et personne ne m'y gronde"
4. "O toi, ma femme, retire-toi d'ici (bis)
Laisse-moi m'y divertir à cette table ronde
Avec tous mes amis, Rosalie, et personne ne m'y gronde"
5. La pauvre femme s'en retourne en pleurant (bis)
"Pleurez, pleurez enfants, vous n'avez plus de père
Je l'ai trouvé couché, Rosalie, avec une autre mère"
6. "Ah! vous ma mère, ne dites pas cela (bis)
Nous savons que fort bien que nous avons un père
Qu'il aime le bon vin, Rosalie, et nous ferons de même"
7. "Sacrés cochons, sacrés cochons d'enfants"(bis)
S'écrie alors la mère, rouge de colère
"Vous serez tous cocus, Rosalie, comme le fut votre père!"
"Quoique franchement immorale (!), cette chanson a tout de même été recueillie en Nouvelle-Écosse par un Capucin, le Père Anselme Chiasson. Beaucoup de femmes s'offusquaient en l'écoutant, mais, heureusement, notre ami Hubert Tremblay nous a fourni le dernier couplet."
Commentaire du groupe Le Rêve du Diable qui interprète cette version.
Ces chansons sont chantées au Canada sur un air assez différent du nôtre. L'extrait de La femme du soldat donné plus haut est interprété par un groupe nommé Le Rêve du Diable